Jai la faction des timides, monsieur le maître des requêtes, jai la faction des timides, disait le président ; elle perdra le gouvernement et la France. Le conseiller Ducros, auquel je reprochais son vote en faveur dun cousin de M. Lefèvre, le journaliste libéral et anarchiste de Honfleur, na-t-il pas eu le front de me répondre : Monsieur le président, jai été nommé substitut par le Directoire auquel jai prêté serment, juge de première instance par Bonaparte auquel jai prêté serment, président de tribunal par Louis XVIII en 1814, confirmé par Napoléon dans les Cent-Jours, appelé à un siège plus avantageux par Louis XVIII revenant de Gand, nommé conseiller par Charles X, et je prétends mourir conseiller. Or, si la république vient, cette fois-ci, nous ne resterons pas inamovibles. Et qui se vengeront les premiers, si ce nest messieurs les journalistes? Le plus sûr est dabsoudre. Voyez ce qui arriva aux pairs qui ont condamné le maréchal Ney. En un mot, jai cinquante-cinq ans, donnez-moi lassurance que vous durerez dix ans, et je vote avec vous. Quelle horreur, monsieur, quel égoïsme! Et cet infâme raisonnement, monsieur, je le lis dans tous les yeux. Mais quoi! vous ne trouviez que des mots peu significatifs à me dire au commencement de la soirée! Était-ce un sentiment de politesse exagérée? était-ce la retenue si naturelle quand on se connaît aussi peu? ici sa voix baissa malgré elle? ou était-ce leffet de ce soupçon? dit-elle enfin, et sa voix, pour ces deux derniers mots, reprit subitement un timbre contenu, mais fort marqué. Journal du 19 février 1805, Gallimard, coll. Folio, p 257.
Héros de Juillet, ouvrier ébéniste, fils de ventru, tout ce que vous voudrez, reprit madame de Sauve-dHocquincourt, il monte à cheval avec grâce. Et celui-là, puisque le père sest vendu, évitera de parler politique, et sera de meilleure compagnie que le Vassigny que voilà, qui attriste toujours ses amis avec ses regrets et ses prévisions éternelles. Gémir devrait être défendu, du moins après dîner. Cest ainsi quun amour véritable éloigne de la crapule. Et Coffe pesait ce mot-là pour soi-même. À cet instant, Leuwen soupira à demi-haut. Et ils se remirent à lire les articles qui faisaient briller autrefois dans le Globe le nom de M. Boucaut de Séranville. Peut-être trop de symétrie dans la forme. Est-ce une grâce? Voilà, se dit-il, que Sa Majesté renonce aux finesses bourboniennes.
La peur du docteur redoubla, Lucien entendit ses dents claquer. Les opérations électorales, commencées à dix heures et demie, suivaient un cours régulier. Le président dâge était dévoué au préfet, qui avait eu soin de faire retarder aux portes la lourde berline dun M. De Marconnes, plus âgé que son président dâge dévoué, et qui narriva à Caen quà onze heures. Trente ministériels qui avaient déjeuné à la préfecture furent hués en entrant dans la salle des élections. In the mood for love, Wong Kar-wai, 2000. Pas de scène de première rencontre. Le film se construit comme une succession de rencontres entre deux êtres entre lesquels lamour naît, mais qui choisissent de ne pas vivre cet amour contrairement à leurs conjoints respectifs jamais montrés à lécran qui entretiennent ensemble une liaison adultère. La musique Yumejis theme, Shigeru Umebayashi, la pluie et le jeu des regards témoignent de lévolution des sentiments alors que les dialogues sont presque absents. On était arrivé à la fin de la rue, et Lucien, qui lavait parcourue lentement et en prêtant loreille aux propos quon tenait sur son compte, craignit que sa joie ne se trahît par quelque mouvement imprudent, il se permit de faire un demi-salut fort grave à trois dames qui marchaient presque sur la même ligne que lui et qui parlaient fort haut. Il serra la main avec affection au docteur et disparut. Il monta à cheval, en donnant un libre cours au rire fou qui lobsédait depuis une heure. Comme il passait devant le cabinet littéraire de Schmidt : Voilà le plaisir dêtre savant, pensa-t-il. Il remarqua lofficier libéral, manchot, qui, placé derrière la vitre verdâtre du cabinet littéraire, tenait un numéro de la Tribune et le regarda du coin de lœil comme il passait. Le lendemain il nétait bruit dans toute la haute société de Nancy que de la présence dun uniforme dans léglise des Pénitents, et encore dun uniforme dont le bras droit était décousu et attaché avec des rubans. Ce jeune homme venait dêtre sur le point de paraître devant Dieu, ce fut un jour de triomphe pour Lucien. Il nosa hasarder la messe basse de huit heures et demie. Ceci aurait des conséquences, pensa-t-il ; il faudrait my trouver toutes les fois que je ne suis pas de service. Madame de Chasteller avait oublié son amour pour être uniquement attentive au soin de sa gloire. Elle prêta loreille à la conversation générale. On disait du mal de Louis-Philippe. Milord Link, qui était au milieu deux depuis une heure sans ouvrir la bouche, leur dit avec son air inanimé : Un homme avait un bel habit ; son cousin le lui vola. Les amis du premier, en voulant faire la guerre au second, perçaient et abîmaient le bel habit. Quaurais-je donc si vous triomphez? sécriait le volé. Que restera-t-il donc de la royauté? pourrait vous dire Henri V. Lillusion qui est nécessaire à ce genre de comédie, où la prendrai-je? Quel Français sera aux anges parce que le roi lui a parlé? Cela dit, milord Link crut avoir payé son billet dentrée et ne desserra plus les dents. Quels cheveux magnifiques, avec le brillant de la plus belle soie, longs, abondants! Quelle admirable couleur ils avaient hier, sous lombre de ces grands arbres! Quel blond charmant! Ce ne sont point ces cheveux couleur dor vantés par Ovide, ni ces cheveux couleur dacajou que Raphaël et Carlo Dolci ont donnés à leurs plus belles têtes. Le nom que je donnerais à ceux-ci peut nêtre pas fort élégant, mais réellement, sous le brillant de la plus belle soie, ils ont la couleur de la noisette. Et ce contour admirable du front! Que de pensée dans le haut de ce front, peut-être trop! Comme il me faisait peur autrefois! Quant aux yeux, qui en vit jamais de pareils? Linfini est dans ce regard, même quand il nest arrêté que par un objet sans intérêt. Comme elle regardait sa voiture au Chasseur vert quand nous nous en approchâmes! Et quelle coupe admirable ont les paupières de ces yeux si beaux! Comme ils sont entourés! Son regard est surtout céleste quand il ne sarrête sur rien. Alors, cest le son de son âme quil semble exprimer. Elle a le nez un peu aquilin ; je naime pas ce trait chez une femme, je ne lai jamais aimé chez elle, même quand je laimais Quand je laimais! Grand Dieu! Mais où me cacher! que devenir? que lui dire? Et si elle était à moi? Eh! bien, je serais honnête homme, là comme ailleurs. Je suis fou, ma chère amie, lui dirais-je. Indiquez-moi un lieu dexil, et, quelque affreux quil soit, jy cours.